Nos revendications
Chaque famille au Québec devrait avoir droit à une place dans un service de garde éducatif à l’enfance de qualité et abordable. Pourtant, des dizaines de milliers d’enfants n’ont pas accès à ce service essentiel, ce qui amplifie les inégalités et provoque de nombreux impacts professionnels et financiers dans la vie des parents. Grâce au réseau des services de garde, le Québec a connu des avancées sociales majeures : un meilleur accès des femmes au marché du travail, la réduction des écarts socio-économiques et le soutien au développement global des tout-petits. Pour protéger ces acquis et aller plus loin, voici nos priorités :
1. Un droit universel et inconditionnel à un réseau subventionné
Au Québec, chaque enfant n’a pas automatiquement droit à une place en garderie. La Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance mentionne que l’accès aux services de garde dépend des ressources disponibles. Cette simple phrase a pourtant de grands impacts et contribue à créer des listes d'attente interminables et des inégalités dans l’accès aux places, compliquant ainsi la vie de nombreuses familles.
L’accès aux services de garde ne bénéficie pas du même statut que l’accès à l’école, par exemple, qui est un droit universel et inconditionnel pour tous les enfants. Nous croyons qu’il est essentiel de changer les règles actuelles pour garantir à chaque enfant le droit à un accès universel à des services de garde éducatifs abordables et de qualité, comme c’est le cas pour l’école. Toutefois, contrairement à la scolarisation, qui est obligatoire, les parents conserveraient le choix d’y envoyer ou non leur enfant. Avec la pénurie actuelle, ce choix est malheureusement inexistant pour de nombreuses familles.
Pourquoi c'est important :
1. Égalité des chances pour les enfants
Chaque enfant devrait avoir accès à un environnement éducatif qui favorise son développement global dès le plus jeune âge, peu importe la situation financière ou géographique de sa famille.
2. Soutien aux familles et à l’économie
Un droit universel aux services de garde permettrait aux parents de mieux concilier travail et famille. Cela aiderait aussi à réduire les inégalités de genre, en particulier pour les mères qui sont souvent les premières à sacrifier leur carrière.
3. Une obligation légale pour garantir l’accès
Changer la loi obligerait le gouvernement à assurer suffisamment de places dans les services de garde, peu importe les priorités politiques du moment ou les changements de gouvernements.
2. Augmenter significativement le nombre de places en services de garde éducatifs abordables et de qualité
Des dizaines de milliers de familles québécoises sont touchées par une pénurie majeure de places en services de garde éducatifs à l’enfance. Ce manque crée une pression énorme sur les parents, qui doivent parfois retarder leur retour au travail ou interrompre leurs études une fois leur congé parental terminé.
Nous demandons un investissement massif pour créer davantage de places dans des milieux de garde qui respectent des standards élevés de qualité éducative et qui soient financièrement accessibles pour toutes les familles.
Pourquoi c'est important :
1. Répondre aux besoins réels des familles et soutenir l’accès au marché du travail
Les parents devraient pouvoir compter sur des places en services de garde éducatifs à l’enfance de qualité pour reprendre le travail ou poursuivre leurs études, sans compromettre leur stabilité financière ou leur vie professionnelle.
2. Réduire les inégalités de genre
Le manque de places en garderie force souvent les mères à mettre leur carrière ou leurs études en pause, perpétuant ainsi les inégalités de genre dans la répartition des tâches familiales et sur le marché du travail. En augmentant le nombre de places disponibles, on permet aux femmes de mieux concilier travail et famille et de maintenir une meilleure indépendance financière, en plus de réduire la pénalité à la maternité.
3. Réduire les inégalités sociales
Augmenter les places de qualité et accessibles pour toutes les familles québécoises, peu importe leur revenu, aide à diminuer les écarts sociaux et à offrir des chances égales à tous les enfants.
3. Un programme d’aide financière temporaire pour les parents sans place
Au Québec, quand une famille perd son emploi ou traverse une épreuve comme un accident, des filets sociaux existent pour les soutenir. Pourtant, lorsqu’un parent ne trouve pas de place en garderie, il n’y a aucune aide pour pallier cette situation, bien qu’elle soit causée par un manque d’investissement dans le réseau. Les parents, surtout les mères, sont alors forcés de payer le prix de cette pénurie en mettant leur carrière de côté ou en subissant une pression financière énorme.
Nous demandons la mise en place d’un programme d’aide temporaire, comme un prolongement du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) ou une allocation d’urgence, pour soutenir les familles sans place jusqu’à ce que le réseau des services de garde soit complété.
Pourquoi c'est important :
1. Éviter une crise financière pour les familles
Sans place en garderie, de trop nombreux parents doivent réduire leurs heures de travail, prendre un congé sans solde ou même quitter leur emploi, ce qui plonge leur famille dans une précarité évitable. Une aide temporaire leur permettrait de traverser cette période sans compromettre leur stabilité financière.
2. Réduire l’impact disproportionné sur les femmes
Le manque de places affecte encore majoritairement les mères, souvent celles qui gagnent le moins dans les couples hétérosexuels ou qui sont souvent le seul soutien financier dans les familles monoparentales. Cette situation limite leur autonomie financière, freine leur développement professionnel et fait reculer les avancées pour l’égalité des genres au Québec.
3. Reconnaître que ce n’est pas aux parents de payer pour un problème collectif
L’attente d’une place en garderie ne devrait pas être un fardeau financier pour les familles. Cette pénurie résulte d’un manque d’investissement chronique dans le réseau, et il revient à l’État de prendre ses responsabilités pour assurer des places de qualité et abordables pour toutes les familles qui le souhaitent.
4. Simplifier la conversion des garderies privées
Au Québec, de nombreuses garderies privées non subventionnées souhaitent devenir subventionnées ou encore rejoindre le réseau public des centres de la petite enfance pour offrir des places abordables aux familles. Cependant, le processus actuel de conversion avance trop lentement, ce qui freine l'augmentation rapide de l'offre de services de garde accessibles.
Nous demandons la simplification et l'accélération de ce processus de conversion, afin de faciliter l'intégration des garderies privées au réseau subventionné. Cela permettrait de réduire le fardeau financier des familles qui paient pour une place en service de garde privé non subventionné, en plus d'encourager davantage de garderies privées à rejoindre le réseau public.
Pourquoi c'est important :
1. Assurer un accès équitable à des services de garde abordables
En simplifiant la conversion, plus de familles pourront bénéficier de places subventionnées, réduisant ainsi les inégalités d'accès aux services de garde de qualité.
2. Faciliter la transition pour les opérateurs privés et les parents
Un processus simplifié et surtout, un investissement significatif de la part du gouvernement encouragerait les garderies privées à se convertir, assurant ainsi une transition en douceur pour les opérateurs et offrant aux parents plus d'options abordables.
3. Améliorer la qualité éducative des services de garde
Il a été démontré que les centres de la petite enfance (CPE), qui sont des organismes sans but lucratif, offrent une qualité éducative supérieure en comparaison aux garderies privées. Par exemple, un récent rapport du Vérificateur général du Québec de mai 2024 indique que près de 60 % des garderies subventionnées et non subventionnées ont échoué à l'évaluation de leur qualité éducative en 2022-2023, tandis que ce taux dépasse légèrement les 20 % pour les CPE. De plus, entre 2018 et 2023, la proportion de services de garde en installation qui n’atteignait pas le ratio de deux éducateurs qualifiés sur trois est passée de 32% à 46%. Cette proportion atteint 86% dans les garderies non subventionnées et 53% dans les garderies subventionnées.
Ces résultats suggèrent que les structures sans but lucratif, comme les CPE, qui réinvestissent leurs revenus dans leur mission éducative, semblent offrir une meilleure qualité éducative des services offerts aux enfants.
5. Valoriser les éducatrices grâce à de meilleures conditions de travail
Les personnes éducatrices sont au cœur de la qualité des services de garde éducatifs. Leur expertise, leur dévouement et leur capacité à créer un environnement enrichissant pour nos tout-petits en font des piliers du réseau. Pourtant, leurs salaires et leurs conditions de travail ne reflètent pas l’importance de leur rôle, ce qui fragilise tout le système.
Nous demandons des augmentations salariales significatives et des actions concrètes pour améliorer leurs conditions de travail. Il est également essentiel d’assurer leur développement professionnel tout au long de leur carrière, afin qu’elles disposent des outils et des connaissances issus des plus récentes recherches.
Pourquoi c'est important :
1. Combattre la pénurie de personnel
Les conditions actuelles rendent le recrutement et la rétention des personnes éducatrices qualifiées de plus en plus difficiles. En valorisant leur travail par des salaires et des conditions alignées sur leurs responsabilités, nous pouvons stabiliser le réseau, éviter des fermetures de services et assurer un accès constant aux familles.
2. Garantir une qualité éducative exceptionnelle
Des éducatrices qualifiées et soutenues disposent des outils nécessaires pour accompagner le développement des enfants. Assurer les efforts nécessaires pour prioriser la formation et le développement professionnel est une garantie de qualité pour nos tout-petits.
3. Reconnaître leur rôle fondamental
Les éducatrices ne sont pas de simples gardiennes, mais des expertes de la petite enfance, constituant le premier maillon de l’éducation et apportant un soutien inestimable aux familles. Les valoriser, c’est reconnaître leur rôle clé dans les premières années de vie et dans la société.
6. Rendre les données transparentes et intelligibles
Le ministère de la Famille a mis en place un tableau de bord pour permettre à la population de suivre le développement du réseau des services de garde éducatifs à l'enfance. Bien que cette initiative soit un pas dans la bonne direction, la présentation des données changent régulièrement et ne sont pas présentées de manière facilement compréhensible pour les parents. Cela rend difficile pour le grand public, les acteurs et actrices du réseau et les décideurs de saisir l'ampleur réelle des besoins en places et de planifier en conséquence.
De manière générale, l’information sur les services de garde éducatifs, y compris les processus de plaintes, reste difficile à trouver et à comprendre pour les parents. Nous demandons une transparence accrue des données, accompagnée d’une campagne de communication claire et accessible, pour aider les parents à s’y retrouver. Cela inclut également un accompagnement renforcé pour les familles qui souhaitent signaler des problèmes ou porter plainte, afin qu’elles puissent le faire facilement et en toute confiance.
Pourquoi c'est important :
1. Assurer une allocation équitable des ressources
Des données claires et à jour permettent de diriger les ressources là où les besoins sont les plus criants, assurant une distribution juste et efficace des places disponibles.
2. Informer et soutenir les familles
Des communications fréquentes et adaptées pour les parents ainsi qu’un meilleur accompagnement dans le processus de plaintes permettraient de leur permettre de connaître et d’exercer pleinement leurs droits. Ils pourraient mieux comprendre les processus, anticiper les délais et signaler les problèmes de qualité ou d’accès, sans craindre de complexité ou d’abandon.
3. Encourager des actions gouvernementales rapides et ciblées
Une transparence accrue des données et une meilleure communication permettraient aux citoyens, aux partenaires du réseau et aux décideurs d’avoir une vision claire des enjeux, favorisant des actions rapides et efficaces pour résoudre les problèmes identifiés.
7. Créer des mécanismes pour consulter les parents et répondre à leurs besoins
Le développement du réseau des services de garde éducatifs à l’enfance doit refléter la réalité des familles québécoises. Il s’agit après tout d’un des piliers de la politique familiale du Québec. Pour cela, il est essentiel de mieux comprendre leurs besoins spécifiques. Les méthodes actuelles de consultation, souvent ponctuelles et limitées, ne suffisent pas.
Nous demandons la mise en place de mécanismes réguliers et accessibles pour consulter directement les parents. Cela inclut les familles en situation de vulnérabilité, les parents d’enfants ayant besoin de soutien particulier, les familles issues de l’immigration et celles ayant des horaires de travail atypiques. Ces consultations doivent guider le développement du réseau pour qu’il soit inclusif et adapté à la diversité des réalités familiales.
Pourquoi c'est important :
1. Répondre à l’évolution des besoins des familles
Les besoins des familles changent avec le temps. Des consultations régulières permettraient de mieux anticiper ces changements et d’adapter l’offre en conséquence. Après tout, comme utilisateurs, les parents demeurent les mieux placés pour exprimer leurs besoins.
2. Éviter de laisser des familles pour compte
Sans consultations inclusives et fréquentes, certaines familles, notamment celles en situation de vulnérabilité ou vivant des réalités atypiques, risquent de ne pas être prises en compte dans le développement du réseau. Cela peut accroître les inégalités et exclure ceux qui ont le plus besoin de soutien.
3. Renforcer la légitimité et l’efficacité des décisions
Impliquer les parents directement dans le processus de consultation donne une voix aux utilisateurs finaux du réseau. Cela permet de prendre des décisions mieux informées et plus en phase avec les besoins réels, renforçant ainsi la confiance des familles envers le système.
Sources :
1. Québec (2024). Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance.
2. Québec (2024). Statistiques sur le réseau des services de garde éducatifs à l'enfance.
3. Marie Connoly, Marie Mélanie Fontaine, Catherine Haeck (2023). Child penalties in Canada.
4. Geoffroy Boucher, pour l'Observatoire des tout-petits (2024). Réseau des services de garde éducatifs à l'enfance : un enjeu d'équité financière pour les familles.
5. Vérificateur général du Québec (2024). « Qualité des services de garde éducatifs à l'enfance » dans Rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2023-2024.
6. Québec (2023). Actions pour nos familles.